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 Je compte vous féliciter plus longuement de↩
votre prix Goncourt dans un prochain feuilleton1.↩
Je n'avais pu lire votre nouveau roman pendant↩
les horribles mois d'été2. Puis quand j'ai dû↩
reprendre mes travaux, il y a eu la grève3. Enfin↩
j'avais commencé cette lecture la semaine↩
dernière, avec un extrême plaisir, et j'avais↩
l'intention de vous consacrer le feuilleton d'avant-↩
hier. Puis je me suis imaginé que les Dix se↩
réuniraient le vendredi4 — qui est aujourd'hui —↩
et j'ai craint de vous nuire en vous donnant l'air↩
de vouloir peser sur leur dècision : les Académies↩
n'aiment pas cela. C'est pourquoi je me suis↩
arrêté à mi-chemin etj 'ai vite abordé d'autres↩
romans. Je vais vous retrouver avec joie.
Vous m'avez écrit deux lettres vraiment↩
admirables5. Vous avez autant de cœur que de talent.↩
J'en ai été profondèment touché dans mon immense↩
détresse, et je vous en serai toujours reconnaissant.
 
 Ce vendredi 12 décembre 1919.
 
 
  
  
  
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 9, rue Guénégaud, 6e
    Cher Monsieur,
  Je compte vous féliciter plus longuement de votre prix Goncourt dans un prochain feuilleton1. Je n'avais pu lire votre nouveau roman pendant les horribles mois d'été2. Puis quand j'ai dû reprendre mes travaux, il y a eu la grève3. Enfin j'avais commencé cette lecture la semaine dernière, avec un extrême plaisir, et j'avais l'intention de vous consacrer le feuilleton d'avant-hier. Puis je me suis imaginé que les Dix se réuniraient le vendredi4 — qui est aujourd'hui — et j'ai craint de vous nuire en vous donnant l'air de vouloir peser sur leur décision : les Académies n'aiment pas cela. C'est pourquoi je me suis arrêté à mi-chemin et j'ai vite abordé d'autres romans. Je vais vous retrouver avec joie.
 Vous m'avez écrit deux lettres vraiment admirables5. Vous avez autant de cœur que de talent. J'en ai été profondément touché dans mon immense détresse, et je vous en serai toujours reconnaissant.
  Votre ami
  Paul Souday
  Ce vendredi 12 décembre 1919 
 
    
  
  
- 1.
        
- Souday publiera son compte rendu
                    d'À l'ombre des jeunes filles en fleurs dans Le
                    Temps du 1er janvier 1920, rubrique
                    « Les
                    Livres », p. 3. [PK]
        
- 2.
        
- Allusion à la dernière maladie de Madame
                Souday. [PK]
        
- 3.
        
- La grève des imprimeurs du 11 novembre au
                    1er décembre 1919. [PK]
        
- 4.
        
- Les dix membres de l'académie Goncourt
                se sont réunis le mercredi 10 décembre 1919 et ont annoncé à Proust le même jour
                    (CP 03973 ; Kolb,
                XVIII, n° 293) qu'il est le lauréat du prix pour À l'ombre des jeunes
                    filles en fleurs. [PK, ChC]
        
- 5.
        
- Voir la lettre de condoléances que
                Proust adresse à Souday le 2 octobre 1919 (CP
                    03914 ; Kolb, XVIII, n° 233), peu après la mort de
                son épouse, née Alix Jules-Andrieu, et sa lettre du 10 novembre 1919 (CP 03946 ; Kolb, XVIII,
                n° 266), où il explique la composition « voilée » mais « rigoureuse » d'À
                    la recherche du temps perdu. [PK, ChC]